Recruter un stagiaire sur le diagnostic de vulnérabilité : bonne ou mauvaise idée ?
Quand on travaille seul sur l’adaptation au sein d’un territoire, sans temps, sans moyens ni relais internes, se lancer dans un diagnostic de vulnérabilité peut vite devenir une mission trop lourde à porter. D’où l’idée, souvent tentante, de confier cette tâche à un stagiaire. Certains territoires l’ont fait. Avec succès… ou non. Trois retours d’expérience concrets pour aider à se poser les bonnes questions.
Quand un stage bien cadré débloque un diagnostic de vulnérabilité à l’arrêt
En 2023, à la Communauté de communes des Baronnies en Drôme Provençale, le diagnostic de vulnérabilité est amorcé… mais n’avance plus. Mathilde Cota, responsable du Pôle Aménagement Territorial, n’a plus le temps de s’en occuper. Elle alerte sa direction, qui valide l’idée d’un recrutement en stage. Elle prend alors le temps de rédiger une fiche de poste pour clarifier son besoin et poser un cadre.
C’est à ce moment-là qu’Ombrie Gueidan, étudiante en Master 2 Économie Sociale et Solidaire, envoie une candidature spontanée. Le stage peut commencer.
Aujourd’hui chargée de mission transition écologique dans le même EPCI, Ombrie revient sur ces six mois passés en tant que stagiaire : elle s’approprie rapidement la méthode TACCT, reprend le diagnostic amorcé par Mathilde, l’enrichit avec deux ateliers internes, le structure et le finalise dans les temps. Puis elle amorce la préparation des ateliers stratégiques (cadrage, mobilisation des partenaires), qu’elle co-animera une fois embauchée.
Le binôme fonctionne : la stagiaire sur le diagnostic, les enjeux, la coordination technique ; sa responsable sur la mobilisation politique, les élus, le lien avec le PCAET.
Ombrie et Mathilde en sont convaincues : le stage n’aurait pas suffi sans méthode ni accompagnement. Et au-delà des compétences académiques, c’est le savoir-être qui a permis à Ombrie de tenir la barre.
Faut-il forcément accueillir un stagiaire pendant six mois pour avancer sur le diagnostic de vulnérabilité de son territoire ? Dans certains cas, même un stage de courte durée peut suffire à relancer une dynamique d’adaptation au changement climatique.
Quand un stage court redonne de l’élan à une démarche d’adaptation
Isabelle Malot, chargée de mission “Plan climat et résilience” dans une collectivité où elle travaille, seule à ce poste depuis 2010. L’intérêt de TACCT pour elle, est “de vérifier qu’on n’a rien oublié”, faire un tour d’horizon complet des vulnérabilités, identifier les angles morts. Sauf que l’outil ne l’attire pas : “un truc en ligne, avec des cases à remplir… ça ne me donnait pas du tout envie“.
Alors, pour dépasser ce blocage, Isabelle prend un stagiaire. Candidature spontanée, profil atypique (BUT génie biologique et licence environnement et société), formation généraliste : Tom coche peu de cases classiques, mais s’implique avec efficacité.
Au bout de quelques jours de stage, Tom s’approprie l’outil TACCT, mobilise les ressources disponibles (atlas de la résilience, Observatoire de l’environnement, Climadiag, etc.), amorce une cartographie des acteurs et commence à préfigurer un comité d’experts local. Il produit également des fiches de synthèse par impact, prêtes à être discutées.
Initialement, Isabelle espérait pouvoir réunir un comité local et organiser une restitution en deux mois. Mais elle le reconnaît : même avec un bon stagiaire, ce n’était pas réaliste. Le diagnostic reste à finaliser, mais le socle est là : structuré, partageable, prêt à être débattu.
Pour Isabelle, la réussite repose sur trois éléments : un besoin bien identifié, des ressources transmises dès le début, et un stagiaire autonome et débrouillard. Isabelle reste toutefois lucide : “Tous les stagiaires ne sont pas aussi autonomes. Mais quand c’est le cas, ça peut vraiment faire levier.”
Si certaines collectivités franchissent une étape décisive grâce à un stage, d'autres alertent sur les limites du format. Durée trop courte, sujet trop transversal ou trop politique : le diagnostic de vulnérabilité n’est pas toujours une mission adaptée.
Un diagnostic de vulnérabilité confié à un stagiaire ? Retour d’expérience d’un parc naturel régional
Fin 2020, Jeanne rejoint le Parc naturel régional Périgord-Limousin en tant que chargée de mission transition énergétique. Le sujet de l’adaptation commence tout juste à émerger au sein du territoire, poussé par l’ADEME. Un volet “diagnostic de vulnérabilité TACCT” est prévu dans le contrat d’accompagnement d’une durée de trois ans, mais reste en suspens, faute de temps.
En dernière année du contrat, pour ne pas abandonner l’action, l’équipe décide de confier la mission à un stagiaire. Jeanne rédige une offre de stage, mais tardivement. Le premier candidat se désiste. Le second, rappelé en urgence, est en Master 1 de géographie et aménagement, et disponible pour cinq mois et demi.
Un profil moins expérimenté que souhaité, un sujet encore flou, et un territoire vaste (75 communes) difficile à couvrir sans appui solide. L’expérience démarre mal. Et malgré les efforts du stagiaire, le résultat ne suit pas.
Paolo s’implique, mène une vingtaine d’entretiens, et s’efforce d’appliquer la méthode. Mais pour Jeanne, le constat est net : le rendu final ne correspond pas à ses attentes.
Le stage permet malgré tout quelques avancées : une restitution auprès des élus, un atelier en interne, une base de travail pour la suite. Mais la dynamique n’a pas suivi. Deux ans plus tard, tout est repris à zéro par un bureau d’études, avec Jeanne revenue en chef de projet.
Depuis, elle invite à redimensionner les ambitions. Un stage peut avoir toute sa place… à condition de bien choisir le périmètre.
Clarifier son besoin, pour bien cadrer le stage
Un stage peut faire levier. Accélérer, débloquer, structurer une démarche d’adaptation. Mais ce n’est ni une formule magique, ni un raccourci.
Que le profil du stagiaire soit choisi ou imposé, il est essentiel de clarifier votre besoin avant son arrivée. De quoi avez vous vraiment besoin pour avancer ? Rassembler des données ? Structurer ce qui existe déjà ? Préparer un atelier ou de documenter vos entretiens ? Amorcer une cartographie des acteurs ?
Autant de tâches utiles et adaptées à un stage, à condition de définir une mission claire et de garder la main sur les décisions stratégiques.
Les conseils partagés ici s’appliquent également à une personne recrutée en alternance sur le diagnostic de vulnérabilité.
Un stagiaire sur le diagnostic de vulnérabilité
Ce qu’il ou elle peut faire :
- Réaliser une cartographie des données accessibles sur votre territoire (Climadiag, DRIAS, Facili-TACCT…) et des données locales (observatoires, Atlas)
- Compléter la plateforme TACCT sur la base des retours disponibles
- Amorcer une cartographie des parties prenantes
- Organiser la logistique des ateliers ou entretiens
- Prendre des notes et rédiger des synthèses claires
Ce qu’il ou elle ne peut pas faire seul :
- Animer les ateliers ou entretiens stratégiques
- Définir les thématiques prioritaires du diagnostic
- Mobiliser les élus ou porter la démarche collective
- Écrire le diagnostic de A à Z sans appui
Pour que ça fonctionne :
- Clarifier votre besoin en amont : quel appui vous serait réellement utile ?
- Cadrer un sujet réaliste, adapté à la durée du stage
- Mettre à disposition des ressources utiles : plateforme Facili-TACCT, formation en e-learning de l’ADEME sur l’adaptation de son territoire au changement climatique (CLIMAT47)
- Prévoir des livrables transmissibles, pour que le travail reste utile après son départ
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